Une nuit au coeur de la SaintéLyon.
8481, c’est le dossard qui m’a été attribué pour cette édition 2022 de la Asics SaintéLyon. Ce fameux dossard qui a attendu deux ans avant de pouvoir être enfin honoré. Il a fallu m’armer de patience pour retrouver cette ligne de départ chère à mon coeur, mais l’attente n’a fait que rendre celle d’arrivée meilleure encore.
Je vous emmène avec moi sur ma seconde expérience de la SaintéLyon!

Before … 12 semaines de prépa SaintéLyon avec Run Motion Coach !
Avant ça … Je n’étais pas du genre à suivre une prépa. J’ai toujours fait mes entrainements au feeling, en fonction de mes envies, mais surtout de mes douleurs. Aucun travail d’allure, puisque de toute façon accélérer me déclenchait des paralysies (ah que coucou le syndrome des loges). Je pense que je n’aurais tout simplement physiquement pas pu tenir une prépa, ce qui impactait énormément ma motivation.
Cette année, c’était différent. Opérée en avril, j’ai pu découvrir la course à pied sous un autre angle à partir du mois de juin. Plus de douleur, plus de paralysie; c’est un tout autre sport qui s’est révélé à moi. Je me suis lancée dans une vraie prépa SaintéLyon aux côtés de Run Motion Coach et j’ai A-DO-RÉ l’expérience! Un programme personnalisé, adapté à mon objectif et à mes capacités; des coachs accessibles facilement sur instagram en cas de questions; des séances qui s’importent directement sur ma montre pour n’avoir rien à gérer… Il me suffisait de poser le cerveau et de me laisser guider. J’appréhendais la discipline que cette prépa allait me demander, mais finalement quand tout est aussi simple l’entrainement devient un véritable plaisir !

L’objectif sur cette SaintéLyon.
Compte tenu de ma reprise plus que récente post-opératoire et de mon temps de 2019 (15h16), je m’étais fixée l’objectif réaliste de 13H59, ce qui représentait déjà une belle progression sans être inaccessible pour mon niveau. L’application m’a donc préparé selon cette donnée. Puis finalement … tout au long de la prépa, un petit objectif secret s’est immiscé dans mon esprit. Et si j’était capable de boucler ces 78 km en moins de 13H ? Ce serait fou ! Je n’ose pas trop en parler car je ne suis pas certaine d’en être capable. Il faut être réaliste : je ne suis pas la plus rapide, je reprends tout juste la course après une opération des deux jambes et l’écart avec ma performance de 2019 sur cette même distance est énorme. Je garde donc ce petit objectif pour moi, rangé dans un coin de ma tête…
SaintéLyon Jour-J : Saint-Étienne (KM0) – Saint Christo en Jarez (KM 17).
Départ H-1. Départ imminent ?
Le jour-J arrive ENFIN, après plus de deux ans d’attente. Et je suis rongée par le stress. Impossible de dormir ni de me concentrer sur quoique ce soit durant toute la journée du samedi. Je n’attends qu’une seule chose : prendre ce foutu départ !
Et c’est à 00h30 que celui-ci aura lieu sous quelques flocons, dans la fin de la toute dernière vague de départ. Je dois bien avouer que je ne suis pas sereine de partir en fin de peloton, je n’ai aucune envie de flirter avec les serres files et de me rajouter une pression supplémentaire ce soir. Ce ne sera finalement pas un problème puisque malgré un départ assez lent (environ 6:45/km), j’arrive à remonter rapidement quelques dizaines de coureurs.
17 km, c’est la distance qui sépare la ligne de départ du premier ravito à Saint Christo en Jarez. C’est systématiquement la portion la plus difficile psychologiquement pour moi car rien n’est encore fait. La météo n’est clairement pas optimale et ça annonce très rapidement la couleur de cette SaintéLyon : du brouillard (parfois impossible de voir à plus d’un mètre), de la pluie, de la boue (BEAUCOUP de boue quand on part dans les derniers), du froid… Une SaintéLyon digne de ce nom, comme on les aime finalement ;).
Je remets mon objectif de moins de 13h en question.. Je ne m’en sens plus capable. Maintenir l’allure avec ce terrain … Même si étonnamment, j’arrive à courir dans la boue cette année. Je dois bien avouer que l’accroche des Cascadia 16 de Brooks me surprend agréablement et que mon changement de foulée depuis 2019 me facilite aussi les choses. Je fais du mieux que je peux, je double, en étant tout de même persuadée de ne pas arriver à temps au ravito par rapport à mon objectif.
Puis contre toute attente, c’est avec quasiment 10 mins d’avance sur mon temps prévisionnel que j’arrive à Saint Christo ! Je vais bien, très bien, mon moral remonte en flèche et je m’élance plus déterminée que jamais vers Sainte Catherine. Je me sens CAPABLE de réaliser mon objectif.
Saint Christo en Jarez (KM 17) – Sainte Catherine (KM 30).
Les kilomètres s’enchainent tranquillement, même si je perds un peu de mon avance. Le terrain est vraiment glissant et la visibilité très réduite, la concentration est de mise. Je ne ressens pas encore la fatigue, je mange bien, je m’hydrate bien, aucun problème particulier à l’horizon et je suis vraiment soulagée de gérer si bien ma course même si rien n’est encore gagné.
KM 27, un petit bouchon s’est formé devant, j’ai du mal à doubler. Je comprends quelques mètres plus loin pourquoi : un coureur blessé est obligé de prendre appui sur deux de ses comparses pour s’extirper de la course. Je l’entends geindre de douleur et j’avoue que ça m’a mis un coup. Nous prenons le départ en sachant à quels risques nous nous exposons avec de telles conditions climatiques, la prudence doit rester de mise et je lève instinctivement un peu le pied.
Sainte-Catherine arrive enfin. Je suis dans les temps. Cette année, je ne jette même pas un coup d’oeil aux bus qui se remplissent des abandons. Contrairement à 2019, absolument tout va bien pour moi. Je maintiens l’hypothermie à distance, je cours suffisamment pour conserver de la chaleur, mon estomac se porte bien, la motivation est là… Je n’envisage pas une seule seconde l’abandon, bien au contraire. Cette fois, c’est un temps (à ma hauteur) que je vise. Je remplis ma flasque d’eau, je bois un verre de soupe pour réchauffer mon estomac et anticiper un éventuel coup de froid, je fais une pause pipi (la deuxième déjà ahah) et je file aussi sec.
Sainte Catherine (KM30) – Le Camp – Saint Genou (KM44).
Si j’étais persuadée d’avoir fait la part la plus importante du dénivelé sur les 30 premiers km, c’était sans compter sur la montée qui nous mène jusqu’au signal. Impossible de courir, difficile d’avancer. C’est un enfer sans fin. Je ne pensais réellement pas perdre autant de temps sur cette partie, ce qui me met légèrement en retard par rapport à mon objectif. Je me dis que finalement, moins de 14H c’est bien aussi. Tout ce qui compte à cet instant là, c’est d’arriver coûte que coûte.
Passée cette côte épouvantable, je peux enfin reprendre mon rythme de course. Je réalise très vite que je m’endors littéralement en courant. Mes yeux se ferment tout seuls, ma vigilance s’amoindrit fortement et mon esprit se déconnecte totalement. Je ne sais pas quoi faire pour me réveiller, j’ai tellement hâte que le jour se lève pour que mon corps réagisse de lui-même. En attendant je lutte contre cette implacable envie de dormir. D’expérience, je sais que ça finira par passer et que c’est normal. Contre toute attente, je me force à accélérer pour me tenir éveillée et ça fonctionne.
J’arrive au ravito au moment où le jour pointe enfin son nez et je prends la décision de ne pas m’arrêter du tout pour rattraper les précieuses minutes perdues sur cette dernière portion. Le prochain n’est qu’à une dizaine de kilomètres, ce sera vite là. Petit check rapide : pas de bobo, toujours capable de courir (bien que doucement), je vais bien, tout va bien.
Le Camp – Saint Genou (KM44) – Soucieu en Jarest (KM 55).
Le temps commence à devenir long. Les kilomètres se suivent, je relance sur le plat et dans les descentes même si c’est de plus en plus difficile. Le corps est fatigué, la tête a aussi envie d’en finir, mais globalement tout se passe quand même bien alors je m’estime heureuse. Soucieu se dessine, je me ravitaille, encore une pause pipi (il fallait vraiment être motivée d’ailleurs vu l’état des toilettes!) et je file direction Chaponost. Le dernier ravito avant Lyon… Pétard, ça semble si proche et si loin à la fois !
Soucieu en Jarest (KM 55) – Chaponost (KM 66).
Seulement 11 kilomètres qui m’ont semblé durer une éternité. Tout se passe toujours bien, pas de douleur particulière autre que la fatigue physique. Je n’ai plus du tout envie de dormir, bien trop grisée par l’arrivée qui se rapproche. J’essaie de perdre le minimum de temps, de courir au maximum bien qu’à faible allure (sauf dans les montées pendant lesquelles je marche systématiquement). L’objectif sera compliqué à atteindre mais toujours envisageable en se bougeant le cul… Chaponost finit par arriver et là je réalise. Je réalise que si je termine ces derniers 12 km jusqu’à Lyon en moins de 2H comme prévu, je serai finisher en moins de 13H… Je touche le rêve du bout du doigt, j’y crois! J’embarque des barres de céréales et je ressors du ravito en moins d’une minute top chrono. J’écoute un ou deux vocaux d’encouragements pour me booster et feuuuu.
Chaponost (KM66) – Lyon (78 KM).
Je ne sais pas où je trouve cette force, mais j’accélère. J’ignore la fatigue, j’ignore les rares douleurs (que je ne ressens d’ailleurs absolument pas à ce moment là) et je me dis que c’est maintenant qu’il faut tout donner et ne rien lâcher. La véritable course se joue pour moi sur cette portion! Quasiment plus personne ne court autour de moi et même si c’est absolument horrible de penser ça, je jubile intérieurement d’être en bien meilleur état physique que les coureurs que je double. Je remercie aussi mine de rien mon syndrome des loges qui a totalement altérer de façon positive ma perception de la douleur et m’a rendu beaucoup plus résiliente.
On retrouve tout de même de bien belles côtés sur ces derniers kilomètres, on ne va pas se mentir : elles piquent sévèrement. Ah… le sadisme des organisateurs. On vous aime quand même !
Je continue de m’accrocher. Je lève les yeux et mon coeur se remplit soudain d’émotions au moment où j’aperçois en contrebas le Pont Raymond Barre… Les SaintéLyonnais le savent, c’est à cet endroit précis que les larmes commencent à piquer les yeux. L’arrivée est là, toute proche. C’est fini. On réalise qu’on va le faire. Cette sensation est indescriptible et c’est précisément pour la retrouver qu’on va chercher si loin.
Je vais le faire, je vais remplir cet objectif qui me semblait initialement impossible. Je suis large, très large pour les 12H59. J’arrive encore à courir dans les escaliers et je remercie mon corps de jouer dans mon équipe, de continuer de me porter malgré tout ce qu’il vient d’endurer. On est ensemble, lui et moi. Aujourd’hui je l’aime très fort.
12:42:47. C’est le temps de course après lequel j’ai pu retrouvé deux amies sur la ligne d’arrivée et verser des litres de larmes de soulagement et de fierté. Cette année, je n’ai pas seulement rempli mon objectif : j’ai fait mieux encore. Et ça, ça n’a pas de prix ♥️
Plus que quelques mètres ! J’ai pleuré comme une madeleine à l’arrivée. Finisher SaintéLyon solo 2022 ?
À ceux qui voudraient s’élancer sur leur première SaintéLyon …
Je ne peux que vous encourager, c’est une aventure extraordinaire dont vous vous souviendrez toute votre vie! Faites-vous confiance, croyez en vous et ne vous laissez pas impressionner par la distance. Nous avons tous en nous les ressources pour le faire, vraiment ? Avec de l’envie et une bonne prépa tout est possible.
Si vous souhaitez lire le compte rendu de ma toute première SaintéLyon … Par ICI !
Pour ma part, je crois que je souffre légèrement du syndrome du toujours plus… J’en rêvais secrètement depuis quelques années, cette SaintéLyon 2022 qui s’est extrêmement bien passée pour moi a fini par me convaincre… LyonSaintéLyon, j’arrive…
Bravo à toi pour avoir réalisé ce magnifique trail. Ton récit m’a conforté dans mon idée de le faire pour la 1ère fois l’année prochaine. Tellement hâte d’être en décembre 2023 et pouvoir en découdre avec toutes ces montées, les conditions climatiques et aussi avec moi-même (je pense que je me poserai la question tout le long “mais qu’est-ce que je fais là moi ?? Quelle idée encore”) et que suis-je encore … Mais bon, pour accomplir de grandes choses, il ne suffit pas d’agir, il faut rêver ; il ne suffit pas de calculer, il faut croire. À l’instant présent, place au rêve puis un peu plus tard, la prépa (aie aie aie) Bonne continuation à toi ???
Tu verras, c’est vraiment une belle expérience! (Même si effectivement, on se demande tout du long ce qu’on fait là ?). Bonne prépa à toi !! 🙂